Jour 11 : Fluminimaggiore - Barumini - Santu Lussurgiu

Aujourd’hui, il pl… Ah tiens, non ! Aujourd’hui, il fait très beau, et la météo annonce que ça va continuer, avec le soleil et la chaleur que l’on a déjà connus au début du voyage, pour tous les endroits que l’on va s’apprêter à visiter au cour de la journée.

Mais la première chose à faire, c’est de se restaurer en prenant le petit déjeuner du B&B. La gérante nous avait dit que c’était de 8h à 10h, et à 9h45, on n’est toujours pas prêt… Je descends quand même, un peu (beaucoup) dans les vapes pour réserver une place et s’excuser du retard. La gérante est très accommodante et me fait signe que ce n’est pas du tout grave, on peut prendre notre temps, et on ne s’en gêne pas. Le petit jardin est très joli et c’est agréable de prendre son thé dedans, sachant que la pluie est belle et bien passée ! Dans ce B&B aussi, des petits gâteaux maison sont proposés.

La gérante est beaucoup moins bavarde que celle d’Iglesias, elle ne parle pas l’anglais, mais bredouille quelques mots en français, juste de quoi se débrouiller avec des clients, mais pas non plus de quoi enchaîner les sujets de conversation.

On remballe nos bagages et on s’en va. La voiture était garée devant un supermercato, ça tombe bien, on se réapprovisionne en bouteilles d’eau, en déodorant et en lames de rasoirs, le nécessaire en somme, et nous voilà partis pour Barumini, qui dispose d’un très grand et très beau site nuragique qu’il ne faut pas rater.

La route est relativement longue, près de 70 km pour 1h30 de route, ce sera notre plus grande incursion dans les terres de ce périple, et l’occasion pour nous de découvrir un autre paysage que les monts et montagnes de la côte. Mais avant d’y arriver, Corinne me rappelle qu’on avait aussi prévu quelque chose d’autre sur ce chemin : une balade sur les dunes de sable blanc de Piscinas. À quelques kilomètres, il faut prendre un chemin de traverse vers un petit village et continuer sur quelques kilomètres. La route goudronnée fait place à un chemin pavé, puis à un sentier de cailloux, pour finir par du sable.

Piscinas

Une pancarte écrite en italien semble nous dire que la route ne doit pas être prise, on tourne pour en prendre une autre, mais les pluies des jours précédents l’ont rendue impraticable, une rivière la bloque, et il est interdit de traverser quand c’est le cas (et c’est bien compréhensible).

S’il y a de l’eau, il vaut mieux éviter de traverser…

On retourne s’engager sur la première route, à le relire, le message semble vouloir dire qu’il ne faut pas rouler sur les dunes, ça semble être du bon sens, mais si la pancarte est là, c’est qu’il y en a qui ont dû repousser les limites de l’imbécilité encore plus loin… Un parking bien rempli nous indique qu’en effet, c’était la bonne route à suivre.

Le premier parking est gratuit, et rempli. Le second est payant, mais chat échaudé craignant l’eau froide, on se prend une place. Le tarif à la journée est de 5€, mais on arrive à négocier pour n’avoir que jusqu’à 14h pour 3€, c’est toujours ça de pris. Il est midi et on s’en va crapahuter sur la plage, puis sur une dune que l’on voit au loin. Le chemin n’est pas évident pour y arriver, d’autant que des obstacles naturels nous barrent le chemin : la petite rivière qui barrait la route aux voitures nous barre maintenant la route pour atteindre la dune que l’on s’est fixée, mais un passage à gué en courant nous permet d’avancer. L’escalade avait l’air simple d’en bas, mais c’est vraiment pentu lorsque l’on se trouve à son pied. On avance en zigzag, mais quand on arrive enfin en haut, on a droit à un magnifique panorama.

Magnifique panorama

La plage est longue de plusieurs kilomètres. Les dunes s’étendent jusqu’à deux kilomètres dans les terres et c’est vrai que du haut de la nôtre, on ne distingue rien d’autre que la mer d’un côté et le sable recouvert d’arbustes de l’autre. C’est vraiment très beau !

On regarde les autres dunes en se demandant si on peut y aller aussi, mais on relativise rapidement : la première était déjà suffisamment crevante, le panorama serait-il particulièrement différent de celui sur laquelle on est ? et les distances jouant des tours, combien de temps cela prendrait-il vraiment ?

On s’en retourne donc tranquillement jusqu’à la voiture. Le bar de la plage est ouvert quand on passe devant et on en profite pour se prendre un coca tout en s’enlevant tout le sable des chaussures. Ça fait du bien de se poser un peu. On reprend la voiture vers 13h45, pile dans le temps imparti ! Pour le moment, on n’a pas bien faim, on avisera quand on sera arrivé à Barumini (il nous reste des pommes).

On y arrive vers 15h30. La route était toute droite sur cette partie. Passé une chaîne un peu escarpée, la Sardaigne s’offre à nous sous un autre angle : de très légères collines, des plaines à perte de vue, des champs d’éoliennes, et des routes toutes droites au milieu de tout cela.

Les plaines de Sardaigne, parce qu’il y en a

Évidemment, les routes ont beau être toutes droites, elles n’en sont toujours pas moins mal indiquées et mal fléchées, ce qui fait que l’on tourne un bon bout de temps avant d’arriver à…

Barumini

La ville est toute petite et ne laisse pas un souvenir impérissable, mais on n’est pas venu pour ça, on est venu pour son site nuragique qui est à un petit kilomètre en sortant de la ville.

Le site en lui-même n’est pas bien impressionnant de prime abord : des pierres parsemées un peu au hasard en haut d’une colline, ça ne donne pas très envie comme ça. Comme pour visiter, il faut absolument prendre un guide, on s’inscrit et on attend une vingtaine de minutes que la visite commence. On est deux couples français et un couple hollandais. Notre guide parle un français approximatif pour nous quatre, et un anglais encore pire pour les deux autres. Elle alterne néanmoins régulièrement entre tout le monde pour ne pas que l’on s’ennuie trop, et les informations qu’elle dispense sont très intéressantes.

Le site était recouvert jusque dans les années 50 et ressemblait aux autres collines de la région, sauf pour quelques pierres qui sortaient de terre et que la légende nommait les bouches nuragiques, comme si elles étaient liées à cette civilisation, mais sans jamais en avoir de preuve. Et puis un archéologue originaire de cette ville a eu l’idée de creuser un peu et a découvert ce site, qui est un des plus important de Sardaigne, et qui fait se rejoindre légende et réalité.

Le site en lui-même est composé d’un village de maisons construites à plusieurs périodes en réutilisant les pierres des anciennes constructions et du Nuraghé qui domine la colline.

Vue des maisons construites avec les pierres du Nuragh

Mais qu’est-ce qu’un Nuraghé, vous allez me demander, et bien cherchez dans un dictionnaire, ou sur le ternet ! Mais comme je suis gentil, je vais quand même m’expliquer ici… Un Nuraghé, c’est une grosse structure circulaire qui était propre à la civilisation nuragique (ils ont donné leur nom à leurs maisons, comment ils devaient pas se sentir pisser !). Les tailles varient, et quand il commence à être assez grand, ça peut former une tour qui est rejointe par d’autres tours plus petites.

Dans le Nuraghé de Barumini, il s’est passé autre chose, c’est que la structure originale avec une grande tour centrale et quatre tours au nord, sud, est et ouest, a été renforcée avec trois mètres de renfort à l’extérieur. Les fenêtres se sont retrouvées bouchées, et des passages ont été fermés, rendant tout le truc très difficile à se représenter : il y a des ouvertures à plusieurs mètres de haut, qui étaient les entrées originales du Nuragh ou de certaines pièces et dont l’accès se faisait par des échelles en bois.

La fonction même du Nuraghé est assez floue. La guide nous dit qu’au moment de sa construction, ça ne peut pas être une forteresse étant donné qu’à cette époque, il n’y avait tout simplement pas d’ennemis pour les peuplades vivant sur l’île. Ce serait plus un symbole de puissance ou de pouvoir d’un chef tribal, ou un lieu de culte. Que le Nuraghé ait ensuite été utilisé comme forteresse, pourquoi pas, mais d’un point de vue pratique, il aurait été difficile à défendre, et nous pouvons constater que pour faire tenir plus de vingt personnes dans la cour principale, ça relève de l’exploit… Donc toutes les hypothèses sont valides pour l’instant.

Les guides ont des tailles de groupe complètement variables en fonction du nombre de personnes présentes lorsque la visite commence. Notre groupe de six est plutôt rapide. Un autre guide semble être avec un groupe de un, un allemand rubicond qui a l’air complètement bourré et qui passe son temps à faire des blagues ridicules et à embêter les autres. Quand il doit ressortir du Nuraghé, le passage étant étroit, il s’y prend à de maintes reprises, sous les yeux hilares de son guide et des autres groupes, dont le notre…

Lorsque l’on ressort, on passe devant des maisons plus récentes qui ont utilisé les pierres du Nuraghé pour être construites et dont la forme est carrée, avec des thermes, ce qui rappelle plus le style Romain.

Passé cette visite vraiment très intéressante, on repart pour Santu Lussurgiu où nous attend notre B&B. En fait, il est situé dans une petite ville à côté :

Milis

Ce B&B est assez étrange, parce que dans l’annonce sur Booking, pratiquement toutes les options possibles et imaginables sont actives : il y a un service de voiturier, il y a des navettes pour les aéroport, une conciergerie, la garde d’enfants, le lavage des habits, etc. Quand on arrive, on se rend compte que tout est là… dans le village. En partant sur ce principe, on peut se lâcher sans soucis : n’importe quelle ville propose des taxis, des laveries automatiques, des restaurants…

La gérante, Rafaella, est très gentille, et elle veut nous parler, mais sa maîtrise du français comme de l’anglais laisse à désirer, et on en revient souvent à parler avec les mains ou plus prosaïquement, à utiliser Google translate.

On s’installe, le Wifi n’est pas très bon, mais on arrive à trouver plusieurs adresses où manger dans les environs. Milis ne propose rien, mais toutes les grandes villes sont dans un rayon de 5 km. On part pour un restaurant de viande nommé La Fattoria, mais quand on y arrive, il semble fermé : porte close et personne pour nous accueillir. Qu’importe, on repart en direction de Oristano, où l’on pourra sûrement trouver autre chose.

À même pas un kilomètre, je vois une pancarte pour l’agriturismo Su Barroccu, dont le nom me parle : on l’avait écarté parce que les auberges prennent généralement seulement sur rendez-vous quand on est hors saison, mais les critiques avaient l’air bonnes, et vu qu’il y a le traditionnel Aperto, on tente quand même. L’auberge est tenue par un couple qui ne s’attendait sans doute pas à nous voir. La femme fait une drôle de tête quand on lui demande si on peut manger, puis va demander à son mari… c’est OK, chouette !

Par contre, on prévient de suite, on a déjà vu ça se produire à l’agriturismo Filieri, cette fois, on mangera peu, donc si possible, pas d’antipasti.

« C’est dommage, c’est notre spécialité, ça vous va si je ne vous fais pas le primi piati ( le plat de pâtes) plutôt ? »

Ça nous va très bien, on choisit tous les deux de prendre de la viande en secondo piati, et on s’installe dans le jardin avec un verre de Vernaccia maison (comme tout ici) qui est un vin assez étrange, dont le goût vient après coup, l’attaque est très voire trop légère. La gérante nous dit que c’est pour cela que l’on cuisine beaucoup avec et qu’il n’est servi qu’en apéritif et rarement en vin de table.

Pendant ce temps, on voit toute la famille s’activer pour préparer les entrées, allumer le feu pour les grillades de viande… On est un peu gênés de les voir s’activer comme ça juste pour nous, et on les remercie à chaque fois en constatant leurs efforts.

Quand tout est préparé, on passe à table, on est deux dans une salle gigantesque ! Cette fois, on arrive à résister à l’appel du pain, en sachant qu’il risque de nous prendre de la place pour ce qui va venir, et on avait vu juste… Les antipasti commencent à arriver, et on finit par en compter 7 différents (d’autres restaurants peuvent se targuer d’en compter jusqu’à 12, mais 7 c’est déjà pas mal), tous délicieux. Ça va du simple mais efficace bol d’olives à la salade de porc aux oignons, en passant par les queues d’artichaut au vinaigre balsamique et l’oignon confit (toujours au vinaigre balsamique). Le cannonau de la maison a un goût prononcé de cassis et de mure qui est très frais.

Tout est délicieux, et on se régale. Ne pas avoir mangé le midi à cause du bon petit déjeuner aide bien aussi. Arrivent alors les viandes. Je dis bien les viandes, parce que le maître de maison nous en a préparé plusieurs sortes, dont du cinghiale. En parlant avec lui (avec les mains), on se rend compte que c’est du sanglier. Et outre ce sanglier, on a aussi droit à de la saucisse, et une autre pièce de porc. Le sanglier est fondant à souhait, cuit au même cannonau que celui que l’on boit, et c’est vraiment très bon, mais après ça, plus la saucisse, nos estomacs disent stop d’un coup. La dernière pièce de porc ne trouvera jamais preneur chez nous !

C’est à nouveau une preuve d’échec ! Nous nous arrêtons encore une fois au secondo piati, et on commence à se dire que le dessert est une légende dans les agriturismo. Quand on en fait part à notre hôtesse (ils ont mangé avec nous, sur la table à côté), elle nous explique qu’en général, les desserts sont très simples, parce que c’est normal d’être bien rempli dans les auberges. Leur dessert, c’est une petite part de gâteau aux amandes.

On discute un peu pendant que le mari nous sort son alcool maison à base de citron et de fenouil… C’est bon, mais c’est particulier, et c’est très fort ! On s’en sort pour 56 € pour le repas pour nous deux, en comptant une bouteille de vin supplémentaire que l’on remporte avec nous. La seule demande que l’on nous fait, c’est de laisser un commentaire en français sur TripAdvisor, parce que pour l’instant, ils n’ont que de l’italien, de l’anglais et de l’allemand.

On repart sur ces promesses faciles à tenir, et l’on rentre au B&B pour nous écrouler comme des masses. Encore une journée bien chargée !